Joséphine Baker et les États-Unis, un amour contrarié

Joséphine Baker et les États-Unis, un amour contrarié

The Conversation - François Drémeaux – 28 nov 2021

Le déjeuner à l'Hôtel Theresa, pour le “Baker Day” du 20 mai 1951. Yale University library. Collection Carl von Vechten.

.            Le 28 août 1963, au cours de la Marche sur Washington, de nombreux orateurs se succèdent à la tribune avant que Martin Luther King Jr ne lance son célèbre I have a dream. Parmi les tribuns, une femme en uniforme de l’armée de l’air française : Joséphine Baker. Cet épisode rappelle que la célèbre meneuse de revues a été résistante dans la France Libre, mais aussi engagée contre la ségrégation raciale aux États-Unis.

Des deux amours de Joséphine Baker, « Paris » est le plus documenté, mais le tout premier demeure « mon pays », les États-Unis. Comme un lien entre les deux, les archives diplomatiques de Nantes conservent un dossier issu du consulat général de France à New York, qui éclaire la dernière partie de la vie de l’artiste, à partir de 1951, alors qu’elle réalise de nombreux séjours outre-Atlantique. Ces documents permettent d’interroger l’aura internationale de la chanteuse, ainsi que ses rapports chaotiques avec son pays natal.

.            Les trois soeurs martiniquaises Nardal sont Issues d’une grande famille affranchie de Fort-de-France dont le père, premier ingénieur noir de Martinique, et la mère, professeure de piano, accordent une place primordiale à l’éducation. Les trois Nardal furent les premières noires à obtenir une bourse pour étudier à la Sorbonne. Paulette et ses sœurs se considèrent comme des « bourgeoises noires » avant de prendre conscience de leur différence, en métropole.

Pendant les Années folles, Paris s’entiche de tout ce qui est « nègre », de l’art contemporain au music-hall. Mais Paulette éprouve un certain malaise devant les facéties de Joséphine Baker et essuie des remarques désobligeantes sur les bancs de la Sorbonne. Elle est l’une des premières à proclamer l’impérieuse nécessité pour les Noirs du monde entier d’être fiers de ce qu’ils sont, rencontre René Maran, premier homme de couleur à obtenir le prix Goncourt en 1921, ou les membres de Harlem Renaissance, mouvement artistique afro-américain qui prône la culture comme outil d’émancipation.

Stimulée par cette solidarité raciale naissante, dès 1920, la jeune femme, avec ses sœurs, fait « salon » tous les dimanches dans son appartement de la rue Hébert, à Clamart, où elle reçoit intellectuels et artistes issus de la diaspora afro-descendante, Y défilait l’élite noire de l’époque, tout ce qui comptait parmi l’intelligentsia noire, de Césaire à Senghor en passant par les intellectuels afro-américains. Elles font l’expérience du Paris d’entre-deux-guerres, où la vision du Noir oscille entre la vision colonialiste et la fascination ‘primitiviste’ de certains Parisiens blancs pour le corps, l’art et les artistes noirs.

Cette fascination, Jeanne Nardal l’a critiquée avec virulence dans un de ses articles intitulé ‘Pantins Exotiques’ (1928), notamment à travers la figure de l’américaine Joséphine Baker (qui sera, par mariage, française en 1937), incarnation de cet exotisme. Puis elle crée la Revue du monde noir avec Léo Sajous en 1931. Les discussions autour de l’émancipation, de l’internationalisme noir et du panafricanisme vont jeter les bases de la négritude, ce courant politique et intellectuel dont Senghor et Césaire, visiteurs irréguliers du salon, se feront les chantres. L’histoire n’a retenu que le nom de ces hommes.

Paulette, (debout), Lucy (à gauche) et Jane (à droite) dans le salon de leur appartement à 7 Rue Hébert à Clamart, le 19 Octobre 1935 dans « Les Sœurs Nardal, les oubliées de la négritude » (© DR – Fonds Christiane Eda-Pierre)

.            Après des années d’absence, Joséphine Baker (qu'elle tenait à prononcer BAker, à la française), née Freda Josephine McDonald le 3 juin 1906 à Saint-Louis (Missouri), rentre en 1948 aux États-Unis qu’elle a quittés en 1925, pour un tour de chant qui vire au cauchemar. Ne serait-ce qu’à New York, on lui refuse plus d’une trentaine de réservations d’hôtels à cause de sa couleur de peau. Dans cette Amérique d’après-guerre, la ségrégation raciale est telle qu’il existe un guide de voyage, le Green Book, pour aider les Afro-Américains à se déplacer en toute quiétude. En réaction, l’artiste rapatrie sa famille de Saint-Louis (Missouri) vers son domaine nouvellement acquis en France, le château des Milandes, en Dordogne.

Deux ans plus tard, et après bien des hésitations par suite de la précédente débâcle, son agent la convainc de signer un très rentable contrat avec le Copa City Club de Miami. Il est question de trois mois à résidence en Floride, suivi de deux mois et demi de tournée aux États-Unis. Une proposition que l’artiste ne peut refuser : ses projets aux Milandes nécessitent de lourds investissements.

.            Ces premières années de la décennie représentent un tournant majeur dans la vie de Joséphine Baker avec, bientôt, l’essor de sa « Tribu arc-en-ciel » (une tribu de douze enfants adoptés partout dans le monde) et plus généralement son engagement croissant contre la discrimination raciale.

Dans son contrat américain, elle n’accepte de se produire que dans les cabarets qui tolèrent tous les publics, sans distinction de couleur, et pousse ses demandes jusqu’à faire enlever les inscriptions discriminatoires dans les clubs. Elle exige d’être entourée d’équipes techniques mélangées. Preuve de la popularité de l’artiste, ces conditions inédites aux États-Unis sont acceptées, au prix de quelques lucratifs cachets perdus.

Joséphine Baker agit souvent à l’instinct et acquiert la réputation d’être difficile à contrôler. En avril 1951, elle s’implique en faveur de William McGee, un Afro-américain condamné à mort pour le viol supposé d’une femme blanche – une affaire typique de l’expéditive justice du sud des États-Unis sous l’influence des lois Jim Crow. L’historienne Bennetta explique que « Baker a défendu McGee avec ses émotions, sans réaliser que son cas s’inscrivait dans un contexte politique plus large. » Dans une lettre ouverte, la chanteuse proteste également contre les pratiques de recrutement et les stéréotypes raciaux dans les médias américains. Elle utilise sa notoriété pour batailler sur tous les fronts, le plus souvent sans concertation ni discussion préalable avec les groupes d’activistes locaux.

L’Association nationale pour la promotion des gens de couleur (NAACP), l’une des organisations les plus anciennes et les plus influentes aux Etats-Unis, s’honore de recevoir « la célébrité internationale, Joséphine Baker ». Le 20 mai 1951, elle organise le Baker Day, une grande parade dans les rues de Harlem suivie d’un banquet. L’événement donne l’occasion de se pencher sur l’attitude des diplomates français à l’égard de la turbulente artiste, naturalisée française depuis 1937. Pour le Baker Day, l’ambassade ne donne pas suite à l’idée d’associer « les représentants de la jeunesse française », mais le consul général Roger Seydoux est présent.

Le "Baker Day", mai 1951.

.            Le diplomate est sceptique sur l’avenir de cette vague d’égalitarisme portée par la chanteuse, mais il note, dans une dépêche à l’attention de son ministère, que « le coup a porté et le retentissement est extraordinaire dans les milieux nègres ». Le problème selon lui, c’est que l’artiste n’est pas consciente de la portée politique de l’événement : « Elle ne sembla pas voir l’épée qu’on lui tendait ». Une attitude perçue comme une faiblesse, mais qui évite à l’artiste d’être cataloguée.

Le consulat est de plus en plus embarrassé par les agissements de Joséphine Baker. Elle politise systématiquement ses spectacles avec de longues diatribes égalitaires. À Detroit, par exemple, elle discourt de la Révolution française, établissant un parallèle avec la nécessaire prise de conscience des Noirs américains pour se libérer de l’oppression. Longue ovation. Une dépêche consulaire note avec effroi que deux drapeaux français sont sur l’estrade.

.            Puis le rêve américain s’étiole. Alors qu’on lui promet un avenir à Hollywood, le scandale du Stork Club prend une tournure qui échappe à l’artiste. Le 16 octobre 1951, Joséphine Baker souhaite dîner dans ce restaurant new-yorkais à la mode. On refuse ostensiblement de la servir. Elle appelle la police, mobilise la NAACP, et prend à partie Walter Winchell, influent chroniqueur radio et… ami proche du propriétaire du club. Les médias proches du journaliste se déchaînent alors contre Baker, qui serait tout à la fois fasciste et communiste, internationaliste et antisémite. Le colonel Abtey, ancien chef de Joséphine Baker dans la France Libre, réalise même le déplacement depuis le Maroc pour témoigner devant la presse. Ces fake news avant l’heure entraînent deux longues années de procédures judiciaires et ternissent l’image de la chanteuse. Le FBI s’en mêle et ouvre une enquête. Les contrats s’évanouissent.

Feb. 3, 1952: The day Josephine Baker returned to St. Louis

En pleine tourmente, Joséphine Baker donne malgré tout un récital dans sa ville natale de Saint-Louis. Dans un long discours, elle affine ce que sa biographe américaine Bennetta appelle le Cinderella narrative, tout en affirmant que ce n’est pas la pauvreté qui a causé sa fuite des États-Unis, mais la discrimination, « cette bête horrible qui paralyse nos âmes et nos corps ». Elle se remémore alors les émeutes de East Saint-Louis en mai-juin 1917, les émeutes raciales contre les Noirs les plus violentes de l'histoire des Etats-Unis qui firent plus de 100 victimes afro-américaines, et idéalise son arrivée en France.

.            L’artiste se tourne vers l’Amérique latine pour de longues tournées, du Mexique à l’Argentine en passant par Cuba, où ses fréquentations ainsi que ses déclarations – parfois contradictoires – contribuent plus encore à brouiller son image pour celles et ceux qui, en cette période de guerre froide, ne disposent que d’une vision binaire. « J’aime beaucoup Joséphine Baker et j’admire son cran », écrit Roger Seydoux, consul général à New York, à l’un de ses collègues. Elle « ne manque ni d’intelligence ni de courage, mais malheureusement la clarté d’esprit n’est pas une de ses vertus essentielles ». Pas assez tacticienne, l’artiste perd des soutiens, comme l’influent membre du congrès Adam Clayton Powell Jr qui la qualifie de « Jeanne d’Arc de pacotille ».

Dans les années 1960, la Marche sur Washington ou encore son passage dans le Cuba castriste lui valent plusieurs révocations de visas. Il y a moins d’enthousiasme dans les escales étatsuniennes. En 1963, Joséphine Baker donne même ses conférences de presse en français, accompagnée d’un traducteur. Elle prend ses distances avec la NAACP, mais continue d’être honorée pour ses engagements, comme en 1960 par le Congrès juif américain. Son dernier tour de chant à New York est un triomphe.

.            Les chercheurs Simmons et Crank ont étudié la performance physique comme une métonymie de la modernité. Et de citer Joséphine Baker et sa jupe de bananes. En s’appropriant l’accoutrement, elle le détourne du cliché racial dans une danse novatrice, qui contribue à la façonner en icône noire. Toute sa carrière est à l’avenant. Ses performances induisent fierté pour sa couleur de peau, mais aussi refus d’être enfermée dans l’idée monolithique d’une culture noire. Joséphine Baker qui chante La petite Tonkinoise et danse le charleston est exotique et française, coloniale et américaine, avant-gardiste et internationale. Elle est la figure de proue de l’émergence de la scène jazz en France, l’une des premières musiques populaires dont la portée peut prétendre être mondiale.

« Intersectionnelle avant l’heure », Joséphine Baker est également transnationale. Sa modernité réside dans sa manière d’abolir les frontières, d’user puis de s’affranchir de tutelles institutionnelles. Plus qu’une activiste habitée par une idéologie particulière, c’est une militante indépendante. Ses causes correspondent à son vécu – elle est par exemple plus gaullienne que gaulliste. Elle prône un multiculturalisme sans affiliation, qu’elle diffuse grâce aux réseaux offerts par la pratique de son art, préfigurant ces artistes hollywoodiens dont les engagements tentent de sensibiliser le plus grand nombre.

Joséphine Baker au Panthéon - 2021 nov 30

Joséphine Baker avec Martin Luther King à la marche pour les droits civiques de 1963

Geo - Léia Santacroce – 29 nov 2021

Josephine Baker, March on Washington, August, 28, 1963

.            Le 28 août 1963, la "marche sur Washington pour l'emploi et la liberté", connue en France comme la "marche pour les droits civiques", rassemble deux à trois cent mille personnes. Parmi les nombreux artistes qui soutiennent l'initiative, on retrouve Marlon Brando, Paul Newman, Joan Baez, Bob Dylan ou encore Joséphine Baker, donc.

Naturalisée française en 1937, la chanteuse et danseuse de music-hall née à Saint-Louis dans le Missouri a fait l'essentiel de sa carrière en France, où elle est arrivée au milieu des années 1920. Outre son attachement patriotique à l'Hexagone (elle a rejoint la Résistance française pendant la guerre), elle est très engagée pour l'égalité entre les Noirs et les Blancs. En cette fin août 1963, juste avant les fameux "I have a dream" de Martin Luther King, la militante antiraciste rend un vibrant hommage à son pays d'adoption.

La France, "c'était comme un endroit féerique"

.            Dans son uniforme de la France libre (elle a été sous-lieutenant de l'armée de l'air pendant la Seconde Guerre mondiale), elle est l'une des rares femmes à prendre la parole ce jour-là : "Quand j'étais enfant et qu'on m'a chassée de ma maison, j'ai eu peur et je me suis enfuie, très loin, dans un endroit appelé la France. […] Je dois vous dire, Mesdames et Messieurs, que dans ce pays, je n'ai jamais eu peur. C'était comme un endroit féerique."

Il est extraordinaire qu’elle dise très clairement à une telle foule qu'il y a un Etat beaucoup moins raciste que son pays d'origine, et qu'il s'appelle la France.

Elle évoque ensuite ses voyages aux Etats-Unis bien après être devenue une star de renommée mondiale : "Quand je suis [retournée] à New York, j'ai eu d'autres coups durs - quand on ne me laissait pas entrer dans les bons hôtels parce que j'étais de couleur, ou manger dans certains restaurants. Et puis je suis allée à Atlanta, et ce fut une horreur pour moi. Et je me suis dit : 'Mon Dieu, je suis Joséphine, et s'ils me font ça à moi, qu'est-ce qu'ils font aux autres personnes en Amérique ?'"

"Je n'ai pas pu entrer dans un hôtel en Amérique et obtenir un café"

.            Elle poursuit : "Vous savez, mes amis, que je ne vous mens pas quand je vous dis que j'ai pénétré dans les palais des rois et des reines et dans les maisons des présidents. Et bien plus encore. Mais je n'ai pas pu entrer dans un hôtel en Amérique et obtenir une tasse de café, et cela m'a mise en colère." Celle qui deviendra la mère adoptive d'une "tribu arc-en-ciel" a aussi des mots pour les autres minorités : "les Orientaux, les Mexicains et les Indiens, ceux d'ici aux Etats-Unis et ceux de l'Inde".

L'interprète de "J'ai deux amours" conclut d'un solennel et tonitruant : "Mesdames et messieurs, mes amis, ma famille, on vient de me transmettre un petit message. C’est une invitation à rendre visite au président des Etats-Unis, chez lui, à la Maison Blanche. Je suis très honorée. Mais je dois vous dire que ce n’est pas la femme de couleur – la Noire, comme vous dites ici aux Etats-Unis – qui ira là-bas. C’est une femme. C’est Joséphine Baker."

The Speech at the March on Washington.

www.blackpost.org - November 3, 2011

Josephine Baker prend la parole lors de la marche pour les droits civiques à Washington le 28 août 1963. © Keystone/Hulton Archive/Getty Images

.            Josephine Baker is remembered by most people as the flamboyant African American entertainer who earned fame and fortune in Paris in the 1920s.  Yet through much of her later life, Baker became a vocal opponent of  segregation and discrimination, often initiating one-woman protests against racial injustice.  In 1963, at the age of 57, Baker flew in from France, her adopted homeland, to appear before the largest audience in her career, the 250,000 gathered at the March on Washington.  Wearing her uniform of the French Resistance, of which she was active in World War II, she and Daisy Bates were the only women to address the audience. Baker spoke just before Dr. Martin Luther King gave his “I Have a Dream” oration. What she said appears below.

.            Friends and family…

.            You know I have lived a long time and I have come a long way.  And you must know now that what I did, I did originally for myself.  Then later, as these things began happening to me, I wondered if they were happening to you, and then I knew they must be.  And I knew that you had no way to defend yourselves, as I had.

And as I continued to do the things I did, and to say the things I said, they began to beat me.  Not beat me, mind you, with a club—but you know, I have seen that done too—but they beat me with their pens, with their writings.  And friends, that is much worse.

When I was a child and they burned me out of my home, I was frightened and I ran away.    Eventually I ran far away.  It was to a place called France.  Many of you have been there, and many have not.  But I must tell you, ladies and gentlemen, in that country I never feared.  It was like a fairyland place.

And I need not tell you that wonderful things happened to me there.  Now I know that all you children don’t know who Josephine Baker is, but you ask Grandma and Grandpa and they will tell you.  You know what they will say.  “Why, she was a devil.”  And you know something…why, they are right.  I was too.  I was a devil in other countries, and I was a little devil in America too.

But I must tell you, when I was young in Paris, strange things happened to me.  And these things had never happened to me before.  When I left St. Louis a long time ago, the conductor directed me to the last car.  And you all know what that means.

But when I ran away, yes, when I ran away to another country, I didn’t have to do that.  I could go into any restaurant I wanted to, and I could drink water anyplace I wanted to, and I didn’t have to go to a colored toilet either, and I have to tell you it was nice, and I got used to it, and I liked it, and I wasn’t afraid anymore that someone would shout at me and say, “Nigger, go to the end of the line.”  But you know, I rarely ever used that word.  You also know that it has been shouted at me many times.

So over there, far away, I was happy, and because I was happy I had some success, and you know that too.

Then after a long time, I came to America to be in a great show for Mr. Ziegfeld, and you know Josephine was happy.  You know that.  Because I wanted to tell everyone in my country about myself.  I wanted to let everyone know that I made good, and you know too that that is only natural.

But on that great big beautiful ship, I had a bad experience.  A very important star was to sit with me for dinner, and at the last moment I discovered she didn’t want to eat with a colored woman.  I can tell you it was some blow.

And I won’t bother to mention her name, because it is not important, and anyway, now she is dead.

And when I got to New York way back then, I had other blows—when they would not let me check into the good hotels because I was colored, or eat in certain restaurants.  And then I went to Atlanta, and it was a horror to me.  And I said to myself, My God, I am Josephine, and if they do this to me, what do they do to the other people in America?

You know, friends, that I do not lie to you when I tell you I have walked into the palaces of kings and queens and into the houses of presidents.  And much more. But I cold not walk into a hotel in America and get a cup of coffee, and that made me mad.  And when I get mad, you know that I open my big mouth.  And then look out, ‘cause when Josephine opens her mouth, they hear it all over the world.

So I did open my mouth, and you know I did scream, and when I demanded what I was supposed to have and what I was entitled to, they still would not give it to me.

So then they thought they could smear me, and the best way to do that was to call me a communist.  And you know, too, what that meant.  Those were dreaded words in those days, and I want to tell you also that I was hounded by the government agencies in America, and there was never one ounce of proof that I was a communist.  But they were mad.  They were mad because I told the truth.  And the truth was that all I wanted was a cup of coffee.  But I wanted that cup of coffee where I wanted to drink it, and I had the money to pay for it, so why shouldn’t I have it where I wanted it?

Friends and brothers and sisters, that is how it went.  And when I screamed loud enough, they started to open that door just a little bit, and we all started to be able to squeeze through it.  Not just the colored people, but the others as well, the other minorities too, the Orientals, and the Mexicans, and the Indians, both those here in the United States and those from India.

Now I am not going to stand in front of all of you today and take credit for what is happening now.  I cannot do that.  But I want to take credit for telling you how to do the same thing, and when you scream, friends, I know you will be heard.  And you will be heard now.

But you young people must do one thing, and I know you have heard this story a thousand times from your mothers and fathers, like I did from my mama.  I didn’t take her advice.  But I accomplished the same in another fashion.  You must get an education.  You must go to school, and you must learn to protect yourself.  And you must learn to protect yourself with the pen, and not the gun.  Then you can answer them, and I can tell you—and I don’t want to sound corny—but friends, the pen really is mightier than the sword.

I am not a young woman now, friends.  My life is behind me.  There is not too much fire burning inside me.  And before it goes out, I want you to use what is left to light that fire in you.  So that you can carry on, and so that you can do those things that I have done.  Then, when my fires have burned out, and I go where we all go someday, I can be happy.

You know I have always taken the rocky path.  I never took the easy one, but as I get older, and as I knew I had the power and the strength, I took that rocky path, and I tried to smooth it out a little.  I wanted to make it easier for you.  I want you to have a chance at what I had.  But I do not want you to have to run away to get it.  And mothers and fathers, if it is too late for you, think of your children.  Make it safe here so they do mot have to run away, for I want for you and your children what I had.

Ladies and gentlemen, my friends and family, I have just been handed a little note, as you probably say.  It is an invitation to visit the President of the United States in his home, the White House.

I am greatly honored.  But I must tell you that a colored woman—or, as you say it here in America, a black woman—is not going there. It is a woman.  It is Josephine Baker.

This is a great honor for me.  Someday I want you children out there to have that great honor too.  And we know that that time is not someday.  We know that that time is now.

I thank you, and may god bless you.  And may He continue to bless you long after I am gone.